Nicolas BOULARD, invitée Delphine M0NIEZ
Vernissage Jeudi 10 sept. 17h-21h | 10 sept. – 27 nov. 2020 | Communiqué de presse
Cet automne, pas comme les autres, la rentrée se fera sous le signe de Saturne. La mélancolie, dont il est le dieu et le « mélancovid » règnent dans les actualités – nous avons vécu, ou vivons encore, l’isolement, l’exclusion, le sentiment d’impuissance et d’effondrement. Si ce n’est pas un deuil de nos proches, nous sommes en train de faire un deuil de la confiance dans la toute puissance de la science, un deuil de notre société et mode de vie, aussi un deuil de la raison… Ce « désenchantement profond par le monde et ses vérités », se nomme, justement, la mélancolie…
Pas très populaire dans le monde contemporain, la mélancolie, assez ambivalente et polysème, est une disposition fondamentale de l’esprit humain. Elle a été redéfinie à chaque époque, tantôt une source de folie et de génie, ou bien une quête impossible de la perfection, ou encore une appréhension de la mort, un spleen de poètes, une interrogation existentielle, ou bien un manque et désespoir profonds. Bien au-delà de sa désignation courante comme une tristesse passagère, la mélancolie est, avant tout une force motrice de l’art et de la science, une pierre angulaire de la civilisation européenne.
Pour l’artiste Nicolas BOULARD, la mélancolie est surtout une méditation sur la vanité de la matière. Comme d’autres avant lui, il a réfléchi aux stratégies de résilience pour détourner l’éternelle force de désintégration. En analogie avec le monde culinaire et ses processus de raffinement par fermentation. Il démontre comment l’art perfectionne et transforme le matériel en spirituel, le périssable en éternel. Il rappelle que la mélancolie est cet état d’esprit qui tout en désirant réunir le corps et l’esprit, reconnait la nature contradictoire de la condition humaine sur ce monde et par là permet de surmonter la dualité de la destruction et de la renaissance.
La mélancolie dans la démarche de Nicolas BOULARD, comme l’écrit Marion ZILIO dans son brillant texte « révèle le potentiel créatif de toute chose » en libérant, littéralement, les contenants et les contenus. En réinterprétant les deux œuvres emblématiques de la mélancolie : le polyèdre de la gravure de DURER, le cube de GIACOMETTI et la colonne sans fin de BRANCUSI, BOULARD écrit son propre chapitre dans histoire de la quête impossible de l’absolu. La mélancolie, l’ivresse, l’art – voici quelques moyens « perturbateurs » qu’il utilise pour explorer la faille du réel pour en apercevoir dedans, de loin, un reflet de l’âme.
Puisqu’elle permet d’appréhender l’imperfection, la mélancolie reste une des expériences les plus profondes de l’existence humaine. Compagne fidèle des fous et des criminels mais aussi des génies, elle est cette force qui pousse la société, la science et l’art à se réinventer constamment. Dans le monde contemporain, où nous nous imposons un “devoir d’un bonheur permanent et nous refusons toute forme de tristesse, de solitude, d’inaction et de souffrance, la réexamination du concept de la mélancolie, comme nous montre le travail de Nicolas BOULARD, trouve toute sa pertinence, surtout en ce temps de crise.
On retrouve la douce poétique de la mélancolie dans les fragiles dessins de Delphine MONIEZ, une jeune artiste invitée à dialoguer avec le projet de Nicolas BOULARD. Ses mi-natures mortes, mi-paysages imaginaires évoquent un étrange cabinet de curiosités d’une alchimiste à la recherche de la pierre philosophique. Les formes organiques, végétales et minérales s’y télescopent pour créer une mystérieuse géométrie qui invite au voyage vers le monde intérieur.